Conseil 20141989 Séance du 18/09/2014
1) l'étendue des obligations de l'Institut relatives à la mise à disposition des données de santé qu'il a collectées pour l'exercice de sa mission de service public eu égard notamment à la complexité des requêtes à effectuer pour la mise à disposition de certaines informations ;
2) sous quelle conditions les coûts de mise à disposition, qui incluent un traitement des données à caractère personnel pour rendre toute identification impossible, pourraient-ils être mis à la charge des réutilisateurs ?
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 18 septembre 2014 votre demande de conseil relative aux questions suivantes :
1) dans quelle mesure (critères technique et temporel), la mise en oeuvre d'un traitement de données peut-elle être qualifiée de traitement automatisé d'usage courant ?
2) la demande d'un tiers impliquant un traitement de données personnelles relève-t-elle du champ d'application de la loi du 17 juillet 1978 ?
3) les bases de données constituées pour la réalisation d'une étude spécifique demeurent-elles préparatoires jusqu'à la publication du rapport final de l'étude, la production de résultats intermédiaires ne remettant pas en cause cette qualification ?
La commission relève, au préalable, que l'Institut national de veille sanitaire est un établissement public administratif en charge d'une mission de service public en application des dispositions de l'article L. 1413-2 du code de la santé publique, au titre de laquelle il lui appartient de recueillir et de traiter des données médicales de la population.
S'agissant de votre première demande relative aux critères permettant de qualifier un document existant au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978, la commission rappelle que sont regardés comme des documents administratifs existants, les informations qui sont contenues dans des fichiers informatiques et peuvent en être extraites par un traitement automatisé d’usage courant. Il n’en va autrement que lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d'un fichier informatique, faire l'objet de requêtes informatiques complexes ou d'une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l'usage courant pour lequel ce fichier a été créé (conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013). Elle a ainsi précédemment estimé (avis n° 20134348 du 21 novembre 2013), que l’extraction d'informations concernant la consommation d'un médicament ne nécessite pas un traitement des données source de la base excédant un usage courant, dans l'hypothèse où ces informations correspondent non à des données spécifiques n’existant pas en tant que telles dans la base, mais à l’agrégation de données que le SNIIRAM a pour vocation de répertorier conformément à ce que prévoit l’arrêté du 19 juillet 2013, relatif à sa mise en œuvre.
La commission précise que le caractère complexe du traitement peut s'apprécier, ainsi que vous le suggérez, au regard du temps passé par les agents de l'Institut à le concevoir.
S'agissant de votre deuxième question, la commission rappelle que des tiers peuvent, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, solliciter la communication des documents administratifs résultant de l'extraction des données de ce système d'information dans les limites et les conditions prévues par la loi du 17 juillet 1978.
A ce titre, la commission rappelle, ainsi qu'elle l'a énoncé dans l'avis n°20134348, que les dispositions du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 ne font pas obstacle à la communication d'informations à caractère médical extraites de ce fichier dès lors que sont visées par la demande non les données sources, mais les données obtenues après traitement automatisé d’usage courant correspondant à des informations anonymes et globales, par année et par département, ne permettant pas, compte tenu de leur niveau d’agrégation, l’identification, même indirecte, des patients ou des médecins concernés.
S'agissant de la troisième question, la commission rappelle qu'aux termes du 2e alinéa de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 : « Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration ». En application de ces dispositions, la commission distingue ainsi deux types de documents :
-les documents inachevés en la forme, tels que les ébauches, brouillons et versions successives d'un document, qui précèdent l'élaboration d'un document complet et cohérent, et qui ne peuvent être communiqués en l'état. Seul le document achevé sera communicable, le cas échéant.
-les documents préparatoires, lesquels ont acquis leur forme définitive, mais dont la communication est subordonnée à l’intervention de la décision administrative qu'ils préparent.
Au regard des informations que vous lui avez communiquées, la commission indique que le document administratif qui, en application des critères précédemment exposés, pourrait être issu d'un traitement automatisé d'usage courant de la base de données exploitée ne revêt pas en principe un caractère préparatoire dès lors que les informations sources ne sont pas recueillies et traitées en vue de l'intervention d'une décision administrative. Ainsi la circonstance qu'un rapport, éventuellement précédé d'un rapport intermédiaire, soit produit postérieurement à la collecte des données et présente les résultats de leur analyse, ne permet pas de considérer que le document administratif issu de leur traitement soit de nature préparatoire.
Toutefois, la commission estime que dans les cas où la collecte des données médicales et leur traitement seraient effectués en vue de la prise d'une décision administrative, le document qui pourrait être obtenu du fait d'un traitement automatisé d'usage courant, présenterait un caractère préparatoire jusqu'à ce qu'elle intervienne ou que l'administration y ait manifestement renoncé à l'expiration d'un délai raisonnable. Elle considère que pourraient notamment relever de cette hypothèse les cas dans lesquels l'Institut intervient au titre des missions d'alerte sanitaire et de contribution à la gestion des situations de crise sanitaire énoncées aux 3° et 4° de l'article L. 1413-2 du code de la santé publique.